Planifier sa nutrition en randonnée et en course de trail

Que ce soit parce qu’on ne réalise pas son importance ou parce qu’on a l’impression que c’est pertinent de s’y attarder seulement lorsqu’on est un athlète de haut niveau, la planification nutritionnelle est souvent négligée dans le monde de la randonnée et de la course en sentier. Pourtant, c’est un élément important à considérer si on veut profiter pleinement de notre aventure en forêt ! Une gestion inadéquate de son alimentation peut vite transformer une activité que l’on apprécie en un véritable cauchemar… Pour limiter les risques de déshydratation, d’hypoglycémie (chute du taux de sucre sanguin), d’inconforts digestifs et de blessures, nous vous proposons des pistes de réflexion pour vous aider à développer vos stratégies nutritionnelles en contexte de randonnée et de course en trail. 

Quels facteurs faut-il considérer lorsqu’on planifie sa nutrition ?

Plusieurs facteurs vont influencer nos besoins et notre tolérance digestive. Voici donc les principaux facteurs à considérer pour planifier le type et la quantité d’aliments à consommer pendant notre sortie :

L’intensité 

À l’effort, notre sang est redirigé vers les muscles sollicités afin de maximiser leur apport en oxygène. Autrement dit, lors d’une course ou d’une montée très exigeante, le corps envoie le sang principalement vers le cœur et les jambes et met le tube digestif sur « pause ». Donc plus l’intensité de notre activité augmente, plus la digestion des aliments consommés avant et pendant l’effort est ralentie, ce qui augmente les risques de ressentir des inconforts digestifs. Crampes, ballonnements, envies urgentes, nausées… Rien de très agréable ! Planifier son alimentation pour faire des choix en fonction de sa tolérance digestive peut nous aider à éviter de mauvaises surprises lors de nos activités plus intenses.

La durée

Pour une même intensité, plus l’activité est longue, plus la demande énergétique est importante. Notre corps a des réserves d’énergie sous forme de glycogène qu’il peut utiliser lors d’un effort physique, mais celles-ci ne sont pas infinies ! Lors d’une longue sortie, il devient nécessaire d’avoir des aliments ou des boissons qui fournissent de l’énergie pour éviter d’épuiser nos réserves. Sans quoi, la difficulté perçue pour maintenir notre intensité augmente au fur et à mesure que nos réserves de glycogène se vident jusqu’à atteindre l’hypoglycémie, ce qui donne l’impression de « frapper un mur ». Tremblements, transpiration, étourdissements, maux de tête … L’hypoglycémie amène plusieurs symptômes désagréables voir problématiques en particulier dans un environnement où il est important d’avoir accès à tous ses sens et ses réflexes pour assurer sa sécurité.

Les conditions météorologiques

Dame Nature a, elle aussi, son mot à dire quant à la planification nutritionnelle ! Plus notre corps produit de sueur pour dissiper son excès de chaleur et plus il est important de remplacer l’eau et les électrolytes perdus. Il est donc essentiel d’avoir une stratégie d’hydratation en pleine canicule, mais pas seulement ! On pourrait croire qu’il n’est pas utile de boire pendant nos activités hivernales, mais c’est une erreur très commune puisque nous transpirons aussi, en particulier lorsque nos habits ne respirent pas bien. On perçoit plus difficilement la soif lorsqu’il fait froid, alors il est d’autant plus important de planifier son hydratation et le transport de nos boissons pour éviter de se retrouver avec des liquides gelés (Truc : mettre sa gourde dans la poche intérieure de son manteau ou opter pour une boisson chaude dans un thermos). 

Les sentiers

Différents éléments quant à l’endroit de l’activité doivent être pris en compte pour optimiser sa planification. Est-ce ma première visite sur ce sentier ? Certains parcs sont mieux indiqués que d’autres : il est possible qu’on s’engage dans le mauvais sentier et qu’on s’en rende compte seulement quelques kilomètres plus tard… Un dénivelé important ou un parcours plus technique peuvent aussi fausser le temps estimé pour faire la randonnée. De même, s’il y a eu des précipitations dans les jours précédents notre activité, il y est possible qu’on ait besoin d’adapter notre foulée : un parcours boueux risque de nous ralentir et d'augmenter la durée de notre sortie. A-t-on accès à de l’eau potable et si oui, à quel endroit sur le parcours ? Peut-on faire plusieurs boucles pour repasser à sa voiture ou est-ce que le stationnement est loin des sentiers ? Notre planification sera différente en fonction des réponses à ces questions. 

Quelles sont les recommandations nutritionnelles ?

Les recommandations vont variées principalement en fonction du type d’activité et de la durée de celle-ci.

Pour la course en sentier

La course peut avoir un effet anorexigène, c’est-à-dire qu’on ne sentira pas la faim malgré le fait que notre corps ait besoin d’énergie. Plus la durée de notre sortie est longue, plus il est important d’avoir un plan de match pour éviter de vider nos réserves de glycogène et de se déshydrater. 

  • Pour une sortie de moins de 1h30, dans la mesure où on a bien déjeuné et qu’on s’hydrate adéquatement sur une base régulière : on peut boire de l’eau seulement puisque nos réserves de glycogène sont suffisantes pour répondre à nos besoins énergétiques. L’ajout d’électrolytes peut être considéré si on transpire abondamment, mais n’est pas essentiel dans la plupart des cas.

  • Pour une sortie de 1h30 à 3 heures, il est préférable de consommer des aliments riches en glucides et faciles à digérer et d’inclure des aliments ou des boissons qui contiennent des électrolytes (du sel surtout !). On vise généralement :

    • De 30 à 60 g de glucides et entre 400 et 800 ml de liquides par heure

    • De 500 à 700 mg d’électrolytes et entre 4 et 8% de glucides par litre de liquides

  • À partir de 3 heures, on peut viser jusqu’à 90 g de glucides par heure, mais on cherche à combiner différents types d’aliments pour faciliter leur absorption. 

  • À partir de 4 heures, il devient important d’intégrer des aliments solides qui sont riches en glucides, mais qui contiennent aussi une petite quantité de protéines. 

Pour la randonnée

Contrairement à la course où notre tube digestif est « brassé », la randonnée nous permet une meilleure tolérance digestive. On peut donc planifier des aliments autant solides que liquides, toujours en priorisant des aliments riches en glucides pour maintenir nos réserves de glycogène. Si le sentier emprunté est particulièrement difficile avec un dénivelé élevé et un parcours très technique, les recommandations seront similaires à celles de la course en sentier. En revanche, si la randonnée est de nature plutôt récréative, qu’on n’est pas particulièrement essoufflé pendant la montée, il est tout à fait raisonnable de se fier à ses signaux de faim pour déterminer le moment où on s’arrête pour savourer une collation ou notre lunch au sommet de la montagne. 

Concrètement, qu’est-ce que je dois faire ?

Une fois les facteurs précédents déterminés, on peut commencer à planifier notre stratégie nutritionnelle en fonction des recommandations.

S’équiper adéquatement

Il existe une variété d’équipement permettant de transporter le nécessaire pour s’hydrater et se nourrir pendant nos sorties.

Les sacs d’hydratation 

Ils ressemblent à des sacs de randonnée, mais sont plus légers et minimalistes afin d’être confortables à la course. Ils comportent généralement un compartiment à l’arrière pour insérer une poche d’hydratation. Assez spacieux, les sacs d’hydratation sont pertinents lorsqu’on a besoin de transporter davantage de collations, d’équipement et de vêtements, par exemple pour une sortie de quelques heures en hiver.

Les vestes d’hydratation

Un peu comme les sacs d’hydratation, les vestes contiennent des compartiments pour stocker des collations et du matériel, ainsi que des poches à l’avant pour contenir des petites gourdes d’eau. Elles sont plus minces et moins spacieuses que les sacs d’hydratation, donc sont intéressantes pour les sorties de plus courtes durées, ou encore lorsqu’on a moins d’équipement à transporter, par exemple, en été.

Les pastilles pour assainir l’eau (style Aquatabs)

Si on prévoit avoir besoin de se ravitailler en eau, mais qu’aucun accès à l’eau potable n’est disponible sur le parcours, il est possible qu’il soit nécessaire de se tourner vers les cours d’eau. Des pastilles pour assainir l’eau sont alors indispensables !

Planifier ses sources de glucides et ses liquides

Exemple 1

Je prépare une sortie de course en sentier sur un terrain connu dans le cadre d’une journée fraîche (10-15 degrés Celsius, nuageux). Ma veste d’hydratation me permet de transporter 2 gourdes de 450 ml chacune et j’ai des poches pour transporter de petits aliments. J’estime que la course me prendra entre 1h45 et 2 heures, je dois donc viser 30 g de glucides + 400 ml de liquides x 2 heures = 60 g de glucides + 800 ml. Voici ma stratégie :

  • À boire en alternance : 1 gourde de boisson sportive + 1 gourde d’eau (30 g de glucides + 800 ml de liquides dont 400 ml contiennent des électrolytes)

  • À prendre après 45 minutes : 1 compote de pomme format pochette (15 g de glucides)

  • À prendre après 1h30 : 1 datte Medjool (15 g de glucides)

Note : Si je voulais faire un entraînement plus long, je trouverais un sentier où le stationnement est accessible et je ferais des boucles pour revenir à ma voiture afin de remplir mes gourdes d’eau et de boisson sportive et prendre d’autres dattes.

Exemple 2

Mon amie m’invite à faire une randonnée dans les Adirondacks de niveau intermédiaire. C’est la première fois que nous la ferons et on a vraiment hâte parce qu’il annonce beau (20 degrés Celsius, ensoleillé). J’aurai mon sac de randonnée de 25 L dans lequel j’ai un sac d’hydratation de 1,5L en plus de ma bouteille d’eau de 1L et de la place pour un lunch et quelques accessoires incluant mes lunettes de soleil et ma lampe frontale, au cas où ! On estime que la randonnée nous prendra environ 5 heures et comme elle n’est pas trop difficile, je planifie un lunch avec plusieurs collations riches en glucides à manger selon ma faim. Voici ma stratégie :

  • À boire en alternance : 1,5 L d’eau et 1L de boisson sportive (60 g de glucides + 2,5L de liquides dont 1L contient des électrolytes)

  • Collations à répartir dans la journée : 1 banane (30 g de glucides) + 1 paquet de barres aux figues (30 g de glucides) + 1 petit sac de craquelins au fromage (15 g de glucides + électrolytes)

  • Lunch pour le sommet de la montagne : 1 sandwich aux œufs (30 g de glucides + 15 g de protéines) + 80 ml de mélange du randonneur (15 g de glucides + 10 g de protéines)

Attention ! Ce sont des suggestions, la tolérance et les besoins varient d’une personne à l’autre. La seule manière de découvrir ce qui nous convient est de faire des tests durant des sorties plus courtes et d’augmenter graduellement, comme à l’entraînement !

Amener plus que pas assez

Bien qu’on puisse avoir une bonne idée du temps à prévoir pour l’activité, des imprévus sont vite arrivés et peuvent rallonger notre parcours ! Il faut s’y préparer et amener plus que pas assez, d’où la pertinence de se munir d’une veste ou d’un sac d’hydratation. Mieux vaut rapporter une collation et un quart de gourde que d’en manquer !

 À chacun sa stratégie

En résumé, afin que la randonnée et la course en sentier demeurent des activités agréables, il est essentiel de bien les planifier et d’adapter les différentes recommandations nutritionnelles à sa tolérance et à ses préférences personnelles. On ne répétera jamais assez l’importance de faire des tests pour découvrir ce qui convient le mieux à son corps et permettre à ton tube digestif de s’adapter. Après tout, si on peut entraîner ses muscles à devenir plus forts et endurants, on peut aussi entraîner son tube digestif à mieux tolérer les aliments durant l’effort.

Si vous souhaitez être accompagné pour planifier votre prochaine course en sentier, un nutritionniste diététiste du sport pour vous aider. N’hésitez pas à communiquer avec nous au besoin au 450-951-5135 ou à info@endorphinenutrition.com.




Sources:

Costa, R. J. S., Knechtle, B., Tarnopolsky, M. A., & Hoffman, M. D. (2019). Nutrition for ultramarathon running: trail, track, and road. International Journal of Sport Nutrition and Exercise Metabolism, 29(2), 130–140. https://doi.org/10.1123/ijsnem.2018-0255

Hoffman, M. D., Stellingwerff, T., & Costa, R. J. S. (2018). Considerations for ultra-endurance activities: part 2 – hydration. Research in Sports Medicine, 27(2), 182–194. https://doi.org/10.1080/15438627.2018.1502189

Labrie, Mériane. (19 avril 2022). Qu’est-ce que la surcharge en glycogène? - Madame Labriski. Madame Labriski. https://madamelabriski.com/forme/quest-ce-que-la-surcharge-en-glycogene/#:~:text=Le%20corps%20dispose%20normalement%20d,une%20intensit%C3%A9%20mod%C3%A9r%C3%A9e%20%C3%A0%20%C3%A9lev%C3%A9e

Loflin, C. (24 mai 2023). Les meilleurs sacs d’hydratation pour la course à pied en 2023 | Altitude Blog. Altitude Blog. https://fr.altitude-sports.com/a/blog/les-meilleurs-sacs-dhydratation-pour-la-course/

Morin, Isabelle. (s.d.). L’alimentation en trail, une discipline en soi! La Clinique Du Coureur. https://lacliniqueducoureur.com/coureurs/blogue/archives/l-alimentation-en-trail-une-discipline-en-soi/#:~:text=Au%20niveau%20de%20l'apport,d'%C3%A9preuves%20de%20longue%20dur%C3%A9e.

Morin, Isabelle. (s.d.). Les troubles gastro-intestinaux. La Clinique Du Coureur. https://lacliniqueducoureur.com/coureurs/blogue/archives/les-troubles-gastro-intestinaux/

Morin, Isabelle. (s.d.). Mon alimentation au quotidien. La Clinique Du Coureur. https://lacliniqueducoureur.com/coureurs/nutrition-sujets/mon-alimentation-au-quotidien/mon-alimentation-au-quotidien/








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